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Est-ce que les extrêmes se rejoignent vraiment ? Spoiler : NON.

 Renvoyer dos à dos le RN et LFI ne fait pas preuve d’une grande honnêteté intellectuelle. S’il ne fait aucun doute que le RN est bien un parti d’extrême droite, il n’est pas juste de dire que LFI est un parti d’extrême gauche.

Léa Chamboncel

25 juin

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Est-ce que les extrêmes se rejoignent vraiment ? Spoiler : NON.

 Renvoyer dos à dos le RN et LFI ne fait pas preuve d’une grande honnêteté intellectuelle. S’il ne fait aucun doute que le RN est bien un parti d’extrême droite, il n’est pas juste de dire que LFI est un parti d’extrême gauche.

Léa Chamboncel

25 juin

On entend depuis plusieurs années, dans la bouche des responsables politiques, des éditorialistes politiques, mais aussi de nos voisin·es, collègues, etc. une phrase qui ne veut pas vraiment dire grand chose et qui est pourtant brandie comme le seul rempart contre la disparition de notre démocratie : “les extrêmes sont tous pareils, il faut s’y opposer”.  

Elle est parfois prononcée avec un tel dogmatisme qu’elle ne laisse place à aucune nuance, aucun doute, un peu comme un commandement ultime dont la légitimité ne saurait être contestée… Et pourtant, il y a quoi contester car cette affirmation est loin d’être évidente. 

Déjà quand l’on parle d’extrême(s), de quoi parle-t-on ? À quoi / qui, Emmanuel Macron faisait-il référence, lors de sa conférence de presse le 12 juin dernier, quand il a appelé les “modérés de gauche et de droite à se regrouper contre les extrêmes” ? De ce que l’on peut comprendre, il faisait référence à ses principaux concurrents, le Rassemblement national et la France insoumise, qui menacent le maintien de sa majorité à l’Assemblée nationale. Et cette phrase, que l’on va déconstruire ensemble plus bas, est désormais devenue le principal argument de campagne d’un parti politique qui peine à défendre son bilan (catastrophique) et à proposer un projet désirable. 

Ainsi, d’après les membres du gouvernement et les candidat·es du camp présidentiel, si l’on vote pour ces extrêmes c’est le chaos garanti. En gros c’est eux ou l’enfer. Mais renvoyer dos à dos le RN et LFI ne fait pas preuve d’une grande honnêteté intellectuelle. Car en effet, s’il ne fait aucun doute que le RN est bien d’extrême droite, comme l’a rappelé le Conseil d’État en septembre dernier, il n’est pas juste de dire que LFI est un parti d’extrême gauche, comme l’a rappelé le Conseil d’État en mars dernier. 

Et il est vrai que LFI ressemble davantage à la gauche institutionnelle (plutôt soc dem) qu’à une gauche qui prône une rupture évidente avec le système politique et économique en place (plus “extrême” du coup), comme en témoigne le slogan cher à Jean-Luc Mélenchon : “la révolution par les urnes”...  

Mais il est aussi vrai, malgré le vernis craquelé, que le RN est bien un parti d’extrême droite. Jordan Bardella a beau prétendre défendre les droits des femmes, dans les faits, c’est faux. C’est faux dans le programme du RN de 2022 où les femmes sont les grandes oubliées (une seule référence est faite aux mères isolées pour renforcer leurs aides tout en accentuant les contrôles contre les “fraudes”)…  Mais c’est également faux dans les prises de positions politiques de ses membres. C’est ainsi que le RN a été le groupe politique qui s’est le plus opposé ou abstenu lors du vote au Congrès du projet de loi constitutionnelle inscrivant l’interruption volontaire de grossesse (IVG) dans la Constitution, (11 députés ont voté contre et 20 se sont abstenus). C’est aussi ainsi que le RN s’oppose systématiquement à toute augmentation du SMIC, alors qu’on sait que la majorité des personnes vivant du Smic sont des femmes… 

Marine Le Pen a beau dire que son parti n’a jamais été raciste (oui, elle a osé), dans les faits - avec notamment la défense de la préférence nationale - son programme l’est. Et plus globalement, les membres du RN ont beau affirmer que leur parti n’est pas un parti d’extrême droite, il l’est. Cela fait d’ailleurs des décennies que le parti, cofondé par Jean-Marie Le Pen, cherche - sans succès - à se défaire de cette étiquette qui “affole” les électeurices. C’est ce que rappelle un assez vieil article de France Info (octobre 2013) : “Arracher l'étiquette "extrême droite" qui colle à la peau du FN : c'est le combat dans lequel s'est lancé Marine Le Pen, la présidente du parti, mercredi 2 et jeudi 3 octobre. Elle a menacé de poursuivre en justice ceux qui continueraient à accoler ce qualificatif à sa personne et sa formation politique. Ce n'est pas la première fois : en 1995, son père, Jean-Marie Le Pen, a poursuivi Le Monde et Libération. Il a été débouté. Treize ans plus tôt, en janvier 1982, le FN avait obtenu en justice un droit de réponse sur TF1, qui avait qualifié un de ses candidats d'"extrémiste de droite".” 

Donc, vous l’aurez compris, il est totalement faux et erroné de dire que “les extrêmes se rejoignent” et de qualifier LFI - et par extension le Nouveau front populaire - d’extrême. S’il y a bien un extrême à combattre aujourd’hui, c’est l’extrême droite !

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