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La dure vie des (quelques) femmes politiques au Japon

les femmes représentent à peine 16 % des député·es à la Chambre des représentant·es (chambre basse du Parlement) en 2024, soit 73 élues sur 465 sièges — un chiffre en légère hausse, mais toujours l’un des plus bas parmi les pays dits industrialisés.

Léa Chamboncel

20 févr.

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La dure vie des (quelques) femmes politiques au Japon

les femmes représentent à peine 16 % des député·es à la Chambre des représentant·es (chambre basse du Parlement) en 2024, soit 73 élues sur 465 sièges — un chiffre en légère hausse, mais toujours l’un des plus bas parmi les pays dits industrialisés.

Léa Chamboncel

20 févr.

Elle s’appelle Ayaka Yoshida et elle est menacée de mort. Ces menaces de mort, elle les a reçues par millier dans sa boîte email. Un véritable cyberharcèlement qui est loin d’être anodin et qui secoue la femme politique qu’elle est. Il n’y a aucune bonne raison au cyberharcèlement, rien qui ne puisse le justifier. Mais on peut parfois identifier d’où il a pu émergé et de qui il le fait. En l’occurrence, on a pu identifier le fait déclencheur de cette vague de haine et de ces milliers de menaces. Il s’agissait d’un simple message posté sur X par Ayaka Yoshida, élue communiste de la préfecture de Mie au Japon. Un simple message où elle suggérait de mettre des protections périodiques à disposition dans les lieux publics, comme c’est déjà le cas pour le papier toilette. Il n’en fallait pas plus pour réveiller les réseaux masculinistes et misogynes japonais. En quelques heures, c’est un déferlement. Et derrière ça une volonté : la faire taire et la faire cesser ses activités politiques comme le relate L’Humanité. Cette violence n’est pas isolée à l’égard des femmes politiques au Japon, notamment lorsqu’elles s’attaquent à des sujets féministes. 

Et ce n’est pas leur faible représentation et participation à la vie politique locale qui pourra améliorer les choses… En effet, les femmes représentent à peine 16 % des député·es à la Chambre des représentants (chambre basse du Parlement) en 2024, soit 73 élues sur 465 sièges — un chiffre en légère hausse, mais toujours l’un des plus bas parmi les pays dits industrialisés. Le Japon reste ainsi en queue de peloton des pays du G7 en matière d’égalité politique, occupant la 118e place sur 146 au classement mondial de l’écart entre les sexes du Forum économique mondial. Du côté du gouvernement, la situation est tout aussi préoccupante : en octobre 2024, seules deux femmes figuraient parmi les 20 ministres nommés par le Premier ministre Shigeru Ishiba, contre cinq dans le cabinet précédent. Une régression qui en dit long sur la difficulté persistante pour les femmes d’accéder aux responsabilités politiques.

Pourtant, des tentatives ont été faites. En 2018, le Parlement japonais a adopté une loi visant à promouvoir une représentation équitable des femmes et des hommes en politique. Mais cette loi reste purement incitative, sans mécanisme contraignant ni sanctions. Résultat : peu de changements concrets. Des associations féministes et quelques figures politiques courageuses, comme Ayaka Yoshida, tentent de faire bouger les lignes, souvent au prix de leur sécurité. Le harcèlement, les menaces et l’isolement restent le lot commun de celles qui osent prendre la parole sur des sujets tels que les droits sexuels et reproductifs ou l’égalité. Dans un système encore fortement patriarcal, ces voix féminines sont perçues comme des intrus qu’il faut faire taire.

Et la tendance est loin de s’inverser. Dans un contexte international marqué par un backlash contre les droits des femmes des personnes LGBTQIA+ et l’arrivée au pouvoir de masculinistes dans de nombreux pays, le Japon n’est pas une exception. En France aussi, la parité parlementaire recule : l’Assemblée nationale comptait 39 % de femmes en 2022, contre 38,5 % en 2024. Des chiffres en apparence stables, mais qui traduisent un essoufflement des dynamiques paritaires, et l’absence de mécanismes permettant d’éviter les reculs en arrière. Cette stagnation, voire ce recul, est un signal inquiétant : les conquis en matière d’égalité ne sont jamais garantis, et sans mobilisation, ils peuvent disparaître aussi vite qu’ils ont été obtenus. 

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