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Les tradwives sont-elles les nouvelles écolos ?

Ce modèle de vie traditionnel révèle une autre idéologie qui est celle de l’extrême droite, de l’antiféminisme et de l'écofascime. L'un des signes révélateurs de la montée de la propagande d'extrême droite est le désir croissant de revenir à une cellule familiale nucléaire et genrée, car ce mode de vie normalise et autorise la hiérarchie.

Illustration d'Amandine Richaud Crambes

Amandine Richaud-Crambes

16 oct.

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Les tradwives sont-elles les nouvelles écolos ?

Ce modèle de vie traditionnel révèle une autre idéologie qui est celle de l’extrême droite, de l’antiféminisme et de l'écofascime. L'un des signes révélateurs de la montée de la propagande d'extrême droite est le désir croissant de revenir à une cellule familiale nucléaire et genrée, car ce mode de vie normalise et autorise la hiérarchie.

Illustration d'Amandine Richaud Crambes

Amandine Richaud-Crambes

16 oct.

Les « tradwives » ou en français « femmes au foyer » ont commencé à faire le buzz sur Internet en 2020, alors que les gens cherchaient à trouver du plaisir et du réconfort dans les tâches ménagères les plus insignifiantes dans la période de confinement. Le hashtag #tradwife compte aujourd’hui plus de 600 millions de vues sur TikTok.

Bien qu'il n'existe pas de définition unique du terme « tradwife », toutes ont un point com­mun : elles trans­mettent un mes­sage à leurs abon­nées que la vie est plus simple et moins stres­sante dans un mode de vie où la femme est dévouée à son mari, à ses enfants et au soin de son foyer. La vie est meilleure lorsque les femmes adhèrent aux rôles de genre « traditionnels » et se consacrent parfaitement aux tâches ménagères. Dans cette notion, il y a une envie féminine de prendre soin de son mari et de lui préparer à manger tout le temps. Par-dessus tout, les tradwives prônent l'autosuffisance. Dans une ver­sion plus rurale, les tradwives vont pro­mou­voir un retour à une vie plus simple, un retour à la terre, à la nature : nour­rir les cochons, faire son pain au levain, et sa moz­za­rel­la mai­son, l’instruction à la mai­son pour les enfants… Une vie de sim­pli­ci­té qui nous est pré­sen­té comme une pos­sible porte de sor­tie du sys­tème capitaliste, en décalage avec les rationalités néolibérales.

Les tradwives seraient-elles alors les nouvelles militantes à la pointe des luttes anti-capitalistes, promouvant la slow life et l’écologie ? Car ces notions sont partagées avec les pensées écologistes.

Elles sont locavores, rejettent les produits transformés, sont pour le fait maison, l'upcycling, etc. En réalité, les tradwives proposent une surtout une solution fondamentalement conservatrice et individuelle à un échec sociétal : se replier non seulement sur la sphère domestique, mais aussi sur l'histoire. D’après The Guardian[1], à l'aide d'une iconographie idéalisant le passé, elles évoquent le fantasme économique et émotionnel selon lequel les familles, et en particulier les femmes, peuvent se soustraire à la complexité de la société moderne. Il serait agréable de pouvoir choisir de vivre avec un seul revenu ou de pouvoir choisir de rester à la maison et d'élever ses enfants, plutôt que d'y être contraint parce que les frais de garde sont tellement élevés. 

C’est là où la comparaison avec les écologistes n’est plus valable. Ce modèle de vie traditionnel révèle une autre idéologie qui est celle de l’extrême droite, de l’antiféminisme et de l'écofascime. L'un des signes révélateurs de la montée de la propagande d'extrême droite est le désir croissant de revenir à une cellule familiale nucléaire et genrée, car ce mode de vie normalise et autorise la hiérarchie. Dans son livre « How Fascism Works », l'écrivain américain Jason Stanley affirme : « En représentant le passé de la nation comme une structure familiale patriarcale, la politique fasciste relie la nostalgie à une structure autoritaire hiérarchique centrale, qui trouve sa représentation la plus pure dans ces normes ». La Déferlante[2], revue féministe française, explique que le libéralisme politique est accusé de piétiner les normes sociales traditionnelles de la même manière que le libéralisme économique détruit l’environnement. Dans ce sillage, des mouvements identitaires établissent aujourd’hui des parallèles entre désastres climatiques et montée des luttes féministes, queers ou antiracistes. 

En France, le modèle de la tradwife est nouvellement propagé par Thaïs d’Escufon, militante d’extrême droite, antiféministe et ancienne porte-parole de Génération Identitaire. Comme outre-atlantique, beaucoup des portes-paroles des ce mouvements sont associées à l’aile droite américaine. 

[1] https://www.theguardian.com/lifeandstyle/ng-interactive/2024/jul/24/tradwives-tiktok-women-gender-roles

[2] https://revueladeferlante.fr/glossaire/ecofascisme/

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