L’intelligence artificielle (IA) est le nouvel eldorado des entreprises du numérique mais plus largement de toutes les couches industrielles ou servicielles. Elle est même considérée comme la quatrième révolution industrielle et une nouvelle forme de progrès disruptif. Les défenseurs de l’IA diront que grâce à celle-ci, de grosses économies d’énergies pourront être réalisées dans les bâtiments ou les usines avec la régulation des consommations, que le travail et l’accès à la connaissance seront facilités ou encore qu’elle sera une créatrice exponentielle de nouveaux emplois.
Cependant, ce discours ressemble fortement aux arguments capitalistes de l’industrialisation du début du XXème siècle ou à l’automatisation et à la mondialisation des années 80. Il est donc possible de nous interroger si le changement de la société par l’IA, ne serait pas tout simplement une reproduction de l’ancien monde et l’avènement d’un nouveau capitalisme blanc, dominant et extractiviste pour le XXIème siècle ?
En septembre 2024, l’Ademe (Agence Nationale de la Transition Ecologique) alerte sur les impacts environnementaux du numérique, des data centers et de l’IA. Celle-ci évalue que le numérique représente déjà 10% de la consommation d’électricité en France, une empreinte carbone qui pourrait tripler d’ici à 2050, 70 millions d’équipements (smartphones, téléviseurs) inutilisés, ni réparés, ni recyclés en France… Désormais bien documentés, les impacts environnementaux du numérique se révèlent de plus en plus importants. L’Ademe ajoute que « L’étude Hubblo a réalisé une évaluation des impacts environnementaux des centres de données à l’étranger hébergeant des données d’usages venant de France. Les principaux résultats de cette étude montrent que la part de l’empreinte carbone liée aux centres de données passerait de 16 % de l’empreinte carbone du numérique à 42 %. L’empreinte carbone de la France en 2030 passerait alors de 17 MtCO2 eq à 25 Mt Co2 eq ».
Les data center GPU dédiées à l’IA nécessite six à neuf fois plus de puissance électrique qu’une « baie » de processeurs classiques (dédiés aux autres services fournis par les opérateurs de cloud), selon Equinix. « Ces GPU représentent déjà 10 % des processeurs dans nos data centers, mais bien plus de 10 % de notre consommation électrique. Et cette part va augmenter ».Les data centers représentent 2 % de la consommation mondiale d’électricité, soit un coût environnemental non négligeable. Outre l’électricité et l’empreinte carbone, les data centers dédiés à l’IA grignotent sur les sols et le foncier par le besoin de leur construction mais gaspillent également une quantité monstrueuse d’eau dans un contexte de tension mondiale renforcée par le changement climatique. Une conversation moyenne avec ChatGPT consomme approximativement 500 ml d’eau, des impacts considérables si l’on compte les 1,5 milliard d’utilisateurices mensuels. Les investissements dans cette nouvelle technologie sont en voie de dépasser ceux dans les énergies renouvelables. Ce nouvel outil du capitalisme, comme les actuels, trouve une fois de plus ses ressources dans la nature en exploitant les terres rares présentent dans les pays du Sud ou en Chine, dans le détournement de sources naturelles essentielles à la vie comme l’eau et le sol, ou encore renforcent les GES et donc le changement climatique. Il ré-ouvre également la question de l’énergie nucléaire.