Logo du site Popol Media

50 ans après la loi Veil, le droit à l’IVG toujours menacé 

les diverses avancées législatives n’ont pas permis d’enterrer les menaces qui pèsent sur ce droit et le camp des anti-choix gagne de plus en plus de terrain à travers le monde, comme en témoigne la déconstitutionnalisation de l’accès à l’IVG aux Etats-Unis en 2022. 

Léa Chamboncel

23 janv.

Logo du site Popol Media

50 ans après la loi Veil, le droit à l’IVG toujours menacé 

les diverses avancées législatives n’ont pas permis d’enterrer les menaces qui pèsent sur ce droit et le camp des anti-choix gagne de plus en plus de terrain à travers le monde, comme en témoigne la déconstitutionnalisation de l’accès à l’IVG aux Etats-Unis en 2022. 

Léa Chamboncel

23 janv.

Le 17 janvier 2025 marquait le 50ème anniversaire de l’adoption, par l’Assemblée nationale, de la loi relative à l'interruption volontaire de grossesse (IVG), dite “Loi Veil”. Cette loi, votée le 17 janvier 1975, prévoit alors une dépénalisation du recours à l’IVG encadrée par un certain nombre de conditions cumulatives parmi lesquelles : une situation de détresse, une grossesse inférieure ou égale à 10 semaines, une intervention réalisée par un médecin dans un établissement d'hospitalisation, etc. Il faudra ensuite attendre 1982 pour que l’IVG soit remboursée par la sécurité sociale et 2001 pour que le délai soit allongé à 12 semaines et que les mineures n’aient plus à obtenir une autorisation de leurs responsables légaux. En mars 2022 est votée la loi portée par Albane Gaillot prévoyant l'allongement du délai de recours à l'IVG de 12 à 14 semaines de grossesse. Cette réforme a également permis de supprimer le délai de réflexion de deux jours, autrefois imposé afin de confirmer une demande d’avortement après un entretien psychosocial. Enfin, le 8 mars 2024, la liberté de recourir à l’IVT a été inscrite dans la Constitution de la République. 

Nous célébrons donc en ce mois de janvier 2025 50 années d’avancées législatives et de luttes militantes et politiques qui ont été précédées par des événements forts, gravés dans notre mémoire collective comme le Manifeste des 343 en 1971 et le procès de Bobigny en 1972, suite auquel le ministre de la Justice de l’époque a donné consigne au Parquet de ne plus poursuivre les avortements. Et il est important de rappeler que, malgré l’incarnation qu’elle représente à cet égard et le rôle fondamental qu’elle a pu jouer pour inscrire ce droit dans la loi, la lutte pour la légalisation de l’IVG ne repose pas que sur Simone Veil mais bien sur des milliers de femmes - et d’hommes - qui ont oeuvré pour faire du recours à l’avortement un droit. 

Et il est aussi important de souligner que ce droit a évolué au cours de cette moitié de siècle, malgré les attaques qui n’ont pas cessé depuis 1975. Attaques qui, comme le rappelait Simone Veil lors d’un entretien accordé au journal L’Humanité en 2005, revêtent un caractère particulièrement violent et virulent : “J’ai été très surprise de voir certains des parlementaires avec qui j'entretenais des relations amicales tomber dans le machisme et la virulence, surtout quand ils évoquaient les raisons religieuses et philosophiques de leur rejet de la légalisation de l'avortement. Je savais que je pouvais compter sur le soutien des socialistes et des communistes. Il n'est jamais très agréable, quand on est dans une majorité, de compter sur l'opposition pour faire passer son projet, et que certains dans votre camp vous injurient à outrance.” (Entretien de Simone Veil dans L’Humanité, republié dans leur hors-série consacré au droit à l’IVG).  

Malheureusement, les diverses avancées législatives n’ont pas permis d’enterrer les menaces qui pèsent sur ce droit et le camp des anti-choix gagne de plus en plus de terrain à travers le monde, comme en témoigne la déconstitutionnalisation de l’accès à l’IVG aux Etats-Unis en 2022. 

En outre, et alors que ce droit (requalifié pour l’occasion en liberté) a intégré la Constitution il y a un peu moins d’un an, une analyse de son accès sur l’ensemble du territoire s’impose. Ce travail d’analyse a été réalisé par des associations féministes à l’instar du Planning familial qui a commandé le tout premier baromètre relatif à l’accès à l’avortement réalisé en septembre dernier par l’IFOP. Dans ce baromètre, on apprend notamment que la population française est très attachée à ce droit (85 % des personnes sondées) mais qu’il y a toujours une appréhension à en parler librement (2 femmes sur 3 ayant recours à une IVG ont peur d’être jugées ou de subir des remarques de leur entourage). 

Par ailleurs, la présidente du Haut Conseil pour l’égalité, Bérangère Couillard affirmait dans les pages du Hors-série de L’Humanité consacré à l’IVG qu’“Encore 17% de femmes avortent dans un territoire qui n’est pas le leur. Elles sont toujours entre 3 000 à 5000 à partir à l'étranger. Quatre femmes sur dix n'ont pas le choix de la technique d'avortement, avec 80 % d'IVG médicamenteuses.” 

Mais alors, que faire pour améliorer cette situation ? La question de la suppression de la clause de conscience est une piste qui est souvent mise en avant par les associations et les professionnel·les. Néanmoins, il est apparu pendant l’examen de la proposition de loi de l’ancienne députée Albane Gaillot sur l’allongement du délai de recours à l’IVG, que l’exécutif - et plus particulièrement le président de la République n’y était pas favorable. Ainsi, il apparaît assez peu probable, compte tenu également de la situation politique actuelle, qu’une telle mesure soit adoptée à court terme. Pour pallier les difficultés d’accès, le Planning familial a récemment publié 10 recommandations ayant pour objectif : de mieux informer, de simplifier le parcours et de garantir une offre sur l’ensemble du territoire. 

Les pistes existent pour garantir un accès effectif et égal sur l’ensemble du territoire, mais encore faut-il que la volonté politique suive… Et à cet égard, rien n’est trop sûr. 

Soutenez Popol Media

Aidez-nous à rester indépendantes