On entend depuis plusieurs années, dans la bouche des responsables politiques, des éditorialistes politiques, mais aussi de nos voisin·es, collègues, etc. une phrase qui ne veut pas vraiment dire grand chose et qui est pourtant brandie comme le seul rempart contre la disparition de notre démocratie : “les extrêmes sont tous pareils, il faut s’y opposer”.
Elle est parfois prononcée avec un tel dogmatisme qu’elle ne laisse place à aucune nuance, aucun doute, un peu comme un commandement ultime dont la légitimité ne saurait être contestée… Et pourtant, il y a quoi contester car cette affirmation est loin d’être évidente.
Déjà quand l’on parle d’extrême(s), de quoi parle-t-on ? À quoi / qui, Emmanuel Macron faisait-il référence, lors de sa conférence de presse le 12 juin dernier, quand il a appelé les “modérés de gauche et de droite à se regrouper contre les extrêmes” ? De ce que l’on peut comprendre, il faisait référence à ses principaux concurrents, le Rassemblement national et la France insoumise, qui menacent le maintien de sa majorité à l’Assemblée nationale. Et cette phrase, que l’on va déconstruire ensemble plus bas, est désormais devenue le principal argument de campagne d’un parti politique qui peine à défendre son bilan (catastrophique) et à proposer un projet désirable.
Ainsi, d’après les membres du gouvernement et les candidat·es du camp présidentiel, si l’on vote pour ces extrêmes c’est le chaos garanti. En gros c’est eux ou l’enfer. Mais renvoyer dos à dos le RN et LFI ne fait pas preuve d’une grande honnêteté intellectuelle. Car en effet, s’il ne fait aucun doute que le RN est bien d’extrême droite, comme l’a rappelé le Conseil d’État en septembre dernier, il n’est pas juste de dire que LFI est un parti d’extrême gauche, comme l’a rappelé le Conseil d’État en mars dernier.
Et il est vrai que LFI ressemble davantage à la gauche institutionnelle (plutôt soc dem) qu’à une gauche qui prône une rupture évidente avec le système politique et économique en place (plus “extrême” du coup), comme en témoigne le slogan cher à Jean-Luc Mélenchon : “la révolution par les urnes”...