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Internet : No woman’s land?

Internet peut s’avérer être un incroyable outil pour les luttes féministes, le hashtag #metoo en offre un exemple très concret et prouve que les révolutions peuvent désormais se reposer aussi sur les outils numériques. Néanmoins, et comme n’importe quel autre espace, Internet peut aussi être un endroit terriblement violent pour les féministes.

Léa Chamboncel

21 mars

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Internet : No woman’s land?

Internet peut s’avérer être un incroyable outil pour les luttes féministes, le hashtag #metoo en offre un exemple très concret et prouve que les révolutions peuvent désormais se reposer aussi sur les outils numériques. Néanmoins, et comme n’importe quel autre espace, Internet peut aussi être un endroit terriblement violent pour les féministes.

Léa Chamboncel

21 mars

Internet peut s’avérer être un incroyable outil pour les luttes féministes, le hashtag #metoo en offre un exemple très concret et prouve que les révolutions peuvent désormais se reposer aussi sur les outils numériques. 

Néanmoins, et comme n’importe quel autre espace, Internet peut aussi être un endroit terriblement violent pour les féministes comme en témoignent les campagnes de cyber-harcèlement dont sont régulièrement victimes les militant·es. Mais c’est aussi un lieu où prospèrent désinformation et théories masculinistes. Récemment, la Fondation des femmes a publié une étude réalisée par l’Institute for Strategic Dialogue (ISD) très renseignée sur la désinformation en ligne orchestrée par les anti-IVG. On y apprend, entre autres, que “les mouvements anti-IVG se sont emparés avec efficacité des réseaux sociaux pour perpétrer leurs entreprises de dissuasion. Pire encore, les testings effectués par l’ISD montrent le rôle actif des réseaux sociaux dans la propagation des contenus anti-IVG : les algorithmes de recommandation et autres fonctionnalités favorisent la circulation de ce type de contenu, y compris à l’égard des mineur·es.”

Maintenant que “la liberté garantie à la femme d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse” a intégré notre Constitution, il s’agit désormais d’en assurer un accès effectif en luttant de toute urgence contre ce type de désinformation… Pour Pauline Ferrari, journaliste et autrice de “Formés à la haine des femmes” (JC Lattès, 2023) : “Sur la désinformation, il faut que l’ARCOM joue un rôle plus important sur la modération de ce qui se passe en ligne, pour réguler véritablement les plateformes et ce qui y est posté.” * 

Au-delà de la désinformation en ligne, ce qui préoccupe beaucoup les associations féministes, ce sont les cyberviolences. Elles recouvrent toutes les formes de violences exercées à travers des outils numériques. L’association Féministes contre le cyberharcèlement dresse, sur leur site Internet, un état des lieux des cyberviolences : “Selon des études récentes, 1 jeune femme sur 5 déclare avoir été victime d’au moins un cyberharcèlement d’ordre sexuel depuis l’âge de 15 ans et 1 adolescente sur 4 déclare être victime d’humiliations et de harcèlement en ligne concernant son attitude (notamment sur son apparence physique ou son comportement amoureux ou sexuel)*. Ce que ces études ne disent pas en revanche, c’est que les femmes qui subissent d’autres formes de discriminations en raison de leur origine, leur couleur de peau, leur religion, leur orientation sexuelle, leur identité de genre ou d’un handicap sont encore plus exposées à ce type de violences”. 

Depuis plusieurs années, la lutte contre les cyberviolences est devenue une priorité pour de nombreuses associations féministes qui n’hésitent pas à régulièrement pointer du doigt le rôle que jouent (ou refusent de jouer) certaines plateformes en la matière. Beaucoup d’entre elles, à l’instar de Féministes contre le cyberharcèlement ou Stop Fisha, ont élaboré de nombreuses recommandations pour endiguer ce fléau allant de la mise en place de solutions de décryptage des conditions générales d’utilisation des réseaux sociaux à la réalisation d’enquêtes nationales en passant par la formation des professionnel.les (personnel éducatif, travailleureuses sociales, gendarmes et polici·ères, magistrat·es, etc.) et la gratuité des soins pour les victimes (recommandations à retrouver sur le site Internet de l’association Féministes contre le cyberharcèlement). 

Côté gouvernement, la réponse n’est vraisemblablement pas encore à la hauteur comme le souligne Pauline Ferrari pour qui il faut “un renforcement de l’arsenal législatif sur les questions de cyberviolences, avec beaucoup plus de moyens humains et financiers pour des plateformes comme Pharos (portail de signalement des contenus illicites de l’internet), et pour des associations qui luttent contre ces violences comme Féministes contre le cyberharcèlement, En Avant Toutes, Stop Fisha… Ensuite, il est nécessaire de créer un réel rapport de force avec les grandes plateformes du numérique, comme essaient de le faire parfois mollement l’Union Européenne et la France sur la question de la modération. En la matière, il faut augmenter la modération humaine et donner un réel accès transparent aux algorithmes de recommandations.” * 

Pour Nat’Ali, streameuse, militante féministe et cofondatrice de Furax, “Il n’y a pas une recette miracle pour lutter contre le cyberharcèlement, c'est un travail qui doit impérativement avoir lieu sur plusieurs fronts”. Celle pour qui les lois en matière de cyberharcèlement sont insuffisantes insiste aussi sur le rôle et la responsabilité des influenceurs : “Les influencers ont une part énormissime dans les cas de cyberharcèlement récents, que ce soit ceux d'extrême droite qui en font un commerce en se cachant derrière la liberté d'expression, ou les lambda qui parlent jamais de rien sous l'excuse de l'apolitisme alors qu'ils ont un pouvoir immense sur leurs communautés et qu’ils pourraient les éduquer. Ils ont un devoir d'exemplarité mais ils veulent les avantages de la célébrité sans les responsabilités”. * 

Enfin, que ce soit pour lutter contre les violences et la désinformation, il ne faut pas oublier le rôle et l’importance de l’éducation comme nous le rappelle Pauline Ferrari : “Il y a une véritable éducation au numérique et aux enjeux de cyberviolences qui doit être mise en place, dès l’école primaire et jusqu’au lycée, pour donner des clés aux plus jeunes sur comment naviguer en ligne et se protéger des fausses informations, mais aussi comment être des citoyen•nes sur Internet !”. Même constat pour Nat’Ali “Il faut éduquer tout le monde, jeunes et moins jeunes : les parents, les enfants mais aussi les médias. Tout le monde a besoin de prendre plus de responsabilités et de comprendre les mécaniques du harcèlement”. *

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