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L’écologie punitive vs l’écologie heureuse 

Le terme “écologie punitive” est employé par les politicien·nes depuis de nombreuses années, particulièrement des droites et extrêmes droites, pour justifier leur inaction, mandat après mandat.

Illustration d'Amandine Richaud Crambes

Amandine Richaud-Crambes

05 févr.

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L’écologie punitive vs l’écologie heureuse 

Le terme “écologie punitive” est employé par les politicien·nes depuis de nombreuses années, particulièrement des droites et extrêmes droites, pour justifier leur inaction, mandat après mandat.

Illustration d'Amandine Richaud Crambes

Amandine Richaud-Crambes

05 févr.

Alors que la planète flambe et que tous les spécialistes du climat l’annoncent depuis des années, que le GIEC rappelle dans tous ses rapports que les Etats doivent agir pour éviter le pire, l’écologie ne s’est toujours pas implantée dans les politiques mondiales et dans les quotidiens. Je peux même vous dire que malgré ce que l’on pense, il y a une régression importante depuis ces 10 dernières années.

Deux arguments reviennent souvent : les normes environnementales sont trop dures et empêchent la croissance ou le fonctionnement de l’agriculture, de l’industrie ou encore du BTP. L’autre est que l’écologie coûte trop chère et est punitive, appauvrissant et contraignant les ménages.

Le terme “écologie punitive” est employé par les politicien·nes depuis de nombreuses années, particulièrement des droites et extrêmes droites, pour justifier leur inaction, mandat après mandat. Au niveau national et international, les lobbies et les gouvernements expliquent à longueur de temps que l’écologie tue l’économie et le productivisme. Au niveau local, le discours est plus apaisé même si pour certain·es plus feignant·es que sceptiques, ces arguments sont réutilisés.

Pourtant, les bénéfices et co-bénéfices liés à la réelle mise en œuvre d’actions environnementales ne sont plus à démontrer. La réparation ou l’inaction coûtent bien plus cher que la prévention. L’actualité de la grève des agriculteurices est un exemple. Sans rentrer dans la complexité de la politique agricole commune (PAC) et de sa réforme, le discours de la FNSEA explique principalement que les normes environnementales sont la cause de tous les maux des agriculteurices et de leur mal-être. Pas les crédits accumulés pour s’équiper et toujours pousser la production de la terre, pas l’emprise des des agro-industriels comme Mosanto qui poussent au rachat annuel de semences et l’endettement des paysan·nes, ni la politique de marché libéraliste et la signature de traité mortifère pour l’agriculture locale. On peut ajouter le problème des bénéfices disproportionnés de l’industrie agroalimentaire ou des revendeurs (supermarchés). Est-ce donc l’écologie qui est punitive ? Bien au contraire, l’application de méthode de l’agroforesterie ou la diminution des pesticides ont démontré l’augmentation du bien-être chez les agriculteurices. Plus de haies, moins de pesticides donc plus de biodiversité nécessaire à la bonne santé des cultures. Des sols moins travaillés et augmentés par des couverts ou intrants naturels augmentent la fertilité de la terre. Il en est de même pour l’élevage. En termes de dépenses publiques, il faut voir sur le long terme avec la diminution des maladies environnementales (Lymphomes, leucémies, mélanomes, tumeurs du système nerveux central ou cancers de la prostate) et donc des coûts de santé.

L’écologie n’est punitive que lorsqu’on essaie de démontrer que tout est de sa faute plutôt que montrer qu’elle peut améliorer la vie des personnes. Pour cela il faut montrer l’exemple et désigner les bons coupables. Il faut accompagner le changement des comportements avec des systèmes de récompenses plutôt que de taxes ou fiscalités non incitatives pénalisant les plus précaires. Comment faire ? Changer l’ensemble de nos modèles de consommation et production, forcer nos politiques à prendre en compte la crise actuelle et à prendre des décisions pour l’intérêt général plutôt que celui particulier des lobbies notamment. Comment expliquer qu’il faille faire des efforts lorsque des ministres, présidents ou milliardaires se déplacent en jet et vivent dans l’opulence ? Comment demander aux populations qui souffrent au quotidien en les culpabilisant de ne pas faire plus avec moins ? Comment comprendre que l’écologie n’est pas punitive alors que les médias ne montrent que les revendications climatosceptiques, remettent en question les scientifiques et oublient les modèles de réussite leur préférant les informations anxiogènes qui font plus d’audience ?

Le coût des sinistres climatiques est estimé à 10 milliards d'euros pour la seule année 2022 en France, contre 3,6 milliards d’euros en moyenne annuelle sur la décennie 2011-2021. Au poids financier de ces dégâts, il faut ajouter l’impact monétaire des effets sanitaires du changement climatique : entre 22 et 37 milliards de coûts cumulés pour la période 2015-2020 en France métropole, selon Santé publique France. Il faudrait 2,3 Mds€ par an additionnels sur le budget de l’Etat pour éviter ces coûts de réparation, ceux-ci même qui d’ici 2050 impacteront de -10 points le PIB.

Une citation du développement durable oubliée mais qui a eu ses heures de gloire était “du local au global”. L’idée était de démontrer que la moindre action à son échelle, que le retour sur la terre ferme, la liberté d’agir étaient bénéfiques à l’ensemble de la planète. Tout déséquilibre, même le plus petit, peut affecter les écosystèmes, humains comme naturels. Le fameux “effet papillon”. C’est effectivement les initiatives locales et des coopérations populaires qu’il faudrait retenir et montrer le plus possible. Mettre en lumière que l’écologie peut être heureuse, positive et salvatrice. Un exemple qui met du baume au cœur : la réduction de 80% de la déforestation amazonienne depuis le départ de Bolsonaro du pouvoir brésilien. Autre exemple, en Éthiopie, l’utilisation de terres communautaires fortement dégradées est réglementée afin de restaurer les sols et de limiter le surpâturage dans le cadre d’accords communautaires plutôt qu’à l’aide de clôtures. Résultat : la biodiversité, la couverture végétale et l'infiltration de l’eau dans les sols augmentent. Alors que la dégradation des terres arides représente une perte annuelle de produit intérieur pouvant aller jusqu’à 8% dans les pays en développement. En France, le succès des AMAP vient d’une famille du Sud qui a décidé en 2001 de changer son modèle agricole pour permettre aux gens de mieux manger et pour eux de vivre mieux. Cela a tellement bien marché qu’il en existe 2200 aujourd’hui qui font vivre décemment près de 5000 paysan.nes.

Il faut valoriser le coût global et les effets bénéfiques d’une meilleure qualité de l’air, d’une alimentation moins toxique et moins protéinée, la mobilité active, la nature ou encore la diminution des canicules par exemple. La santé mentale et physique sont améliorées, les portes-monnaies tout aussi remplis voir plus, l’anxiété des générations futures moins présentes. On peut entendre dire que ce n’est pas possible partout et notamment les milieux plus ruraux ou les ménages plus précaires et c’est vrai. Mais là encore, ce n’est pas une résultante des politiques environnementales mais bien de l’inaction globale de ceux et celles qui sont au pouvoir, leur incapacité à se projeter dans un futur plus lointain que leur mandat ou de leurs bénéfices financiers. Le choix de rester dans un modèle capitaliste et sociétal mortifère plutôt que d’engager le changement.  Par exemple, abandonner des familles et leur histoire dans des inondations pour faire du clientélisme et laisser construire dans des zones à risques très connues. Ne pas apprendre la leçon, recommencer et recommencer, laisser le désespoir s’installer.

L’écologie punitive n’existe pas. La politique punitive, elle, est bien réelle. En ne faisant rien, les politiques et les industriels tuent à petit feu les populations, notamment les plus vulnérables (femmes, enfants, minorités, etc.) ainsi que la planète. Je ne sais pas vous, mais personnellement, j’ai envie de me lever le matin avec un petit peu d’espoir, écologique et démocratique. Essayons ensemble. 

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