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Migra, Migra, Migram

Fin janvier, l’ONG de défense des droits humains Human Rights Watch (HRW) a publié un rapport intitulé "Ce n’est pas la France que j’avais imaginée" qui  affirme que  "le département français des Bouches-du-Rhône, où se trouve Marseille, la deuxième ville de France, ne fournit pas aux enfants migrant·e·s non accompagné·es les protections dont ils ont besoin et auxquelles ils ont droit."

Illustration de Clothilde Le Coz

Clothilde Le Coz

21 févr.

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Migra, Migra, Migram

Fin janvier, l’ONG de défense des droits humains Human Rights Watch (HRW) a publié un rapport intitulé "Ce n’est pas la France que j’avais imaginée" qui  affirme que  "le département français des Bouches-du-Rhône, où se trouve Marseille, la deuxième ville de France, ne fournit pas aux enfants migrant·e·s non accompagné·es les protections dont ils ont besoin et auxquelles ils ont droit."

Illustration de Clothilde Le Coz

Clothilde Le Coz

21 févr.

En dehors de l’OM, la dernière fois que Marseille a fait les gros titres de la presse internationale, le pape François s’y rendait pour prononcer un discours demandant aux Européen·nes de faire preuve d’humanité sur la question migratoire. Avant son arrivée, le Pape avait d’ailleurs déclaré : “Je vais à Marseille ; pas en France”. Marseille était alors au cœur de la grande question migratoire en Méditerranée, ne connaissant donc plus de frontière. À ce moment-là une cinquantaine de mineur·es isolé·es avaient occupé l’Eglise Notre Dame du Mont puis avaient été mis·es à l’abri. Iels ont fait figure d’exception.

Non-assistance à personne en danger

Fin janvier, l’ONG de défense des droits humains Human Rights Watch (HRW) a publié un rapport intitulé “Ce n’est pas la France que j’avais imaginée” qui  affirme que  “le département français des Bouches-du-Rhône, où se trouve Marseille, la deuxième ville de France, ne fournit pas aux enfants migrant·e·s non accompagné·es les protections dont ils ont besoin et auxquelles ils ont droit.” C’est également ce que déclare depuis 2021 Claire Hédon, la Défenseure des droits. Et pour cause ; la protection et les droits des personnes migrantes était absente du programme de campagne d’Emmanuel Macron en 2022.

Il est estimé qu’aujourd’hui, entre 150 et 200 migrant·es mineur·es dorment dans les rues de MarseilleSelon HRW, la moitié de celleux qui font l’objet de tests d’évaluation de leur âge se voient refuser la reconnaissance de leur statut d’enfant, décisions qui seront finalement annulées pour 75 % d’entre elleux quand iels déposent un recours devant les tribunaux. Le temps que leurs recours soit examiné par le tribunal, iels sont privé·es d'hébergement d'urgence, d’aide juridique ou de protection universelle en matière de santé et d'éducation. Et c’est une histoire complexe d’administration car celleux qui ne sont pas reconnu·es officiellement comme enfants ne sont pas non plus considéré·es comme adultes en ce qui concerne les soins dont iels peuvent bénéficier. Iels ne peuvent donc souvent pas être pris·es en charge à la hauteur de leurs maux. Et pourtant, d’après HRW, des maux, il y en a. C’est contraire aux obligations de la France qui est tenue de leur accorder des garanties spéciales protégeant leurs droits humains, telles que définies dans le droit international et européen

Faire le travail des pouvoirs publics

Au total, 14 700 mineur·es étranger·es sont arrivé·es sur le sol français en 2022. Selon le ministère de la Justice, cela équivaut au niveau de 2017. Les trois principaux pays de provenance de ces mineur·es isolé·es sont la Côte d'Ivoire, la Guinée et la Tunisie. La proportion de filles et jeunes femmes (6,8%) est en hausse par rapport à 2021 ; la majorité d’entre elles vient de Côte d'Ivoire, de Guinée et de République démocratique du Congo.

En France, les enfants migrant·es non accompagné·es ont droit à un accueil provisoire d’urgence (APU), en attendant une évaluation de leur âge. Depuis 2017, au moins 3 rapports du Sénat dressent le même constat : le dispositif de mise à l'abri est insuffisant. 

Les organismes d’entraide sont nombreux à exprimer leur incapacité à faire plus et surtout le fait qu’ils fassent le travail des pouvoirs publics. À Marseille, fin 2022, un collectif de jeunes migrant·es isolé·es a dû être évacué après que la mairie a pris un arrêté de péril sur le bâtiment dans lequel iels logeaient faute de solution d’hébergement. 

Certain·es tirent la sonnette d’alarme, comme le département de l’Ain qui a fait le choix de s’exposer sciemment à des condamnations du tribunal administratif. Depuis fin 2023, il a annoncé qu'il suspendait temporairement (pour une durée de trois mois) la prise en charge des jeunes migrant·es isolé·es arrivant directement dans le département car il n’est plus en mesure de les accueillir. Cela va dans le sens du Sénat, qui souhaite que l’État se charge de l’évaluation et de la mise à l’abri. Allez, encore une piste pour continuer à faire de Marseille ce grand laboratoire politique, cette fois sur la scène internationale. 

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